Matton : La priorité pour Citroën, désormais, est de préparer 2018

"Certaines évolutions nécessitent plusieurs mois de développement"

Par Franck Drui

3 juillet 2017 - 09:58
Matton : La priorité pour Citroën, (...)

En se présentant au départ du Rallye de Pologne avec une C3 WRC bénéficiant d’évolutions, Citroën Racing espérait entamer une nouvelle phase dans sa saison 2017. À l’arrivée, le bilan est indéniablement positif, avec une constance aux avant-postes et trois voitures à l’arrivée.

Yvers Matton reconnait toutefois que la priorité pour Citroën, désormais, est de préparer 2018. Debriefing et interview.

UNE COURSE DICTÉE PAR LA MÉTÉO

Après des reconnaissances effectuées sous un soleil radieux, la pluie s’invitait sur le nord de la Pologne dès le jeudi matin. Elle s’intensifiait encore le vendredi, au moment où les voitures s’élançaient dans les premières spéciales.

Positionnés dans la seconde partie de la liste des ordres de départ, les pilotes des C3 WRC étaient condamnés à évoluer dans la boue brassée par les premiers… La matinée était particulièrement difficile pour Craig Breen, victime d’un problème de transmission qui transformait sa voiture en trois roues motrices ! Avec sept minutes perdues au cours de la matinée, l’Irlandais voyait ses espoirs de bon résultat s’envoler d’emblée. Andreas Mikkelsen perdait lui aussi plus d’une minute à cause d’une suspension cassée lors d’un choc contre un arbre.

Constamment en bagarre pour la huitième position, Stéphane Lefebvre effectuait une première étape sans faute. Neuvième au moment de rentrer au parc fermé, il restait au cœur du groupe de chasse.

Le vendredi après-midi permettait également à Andreas Mikkelsen de se mettre en évidence. Après avoir fait évoluer ses réglages à l’assistance de mi-journée, le Norvégien signait ses premiers chronos dans le top 5.

Samedi, le soleil était de retour pour le début de la plus longue journée du rallye. Avec l’ordre de départ inversé par rapport au classement de la veille, Breen et Mikkelsen s’élançaient en premiers, suivis de Stéphane Lefebvre en cinquième position.

Des trois pilotes Citroën, le Français réalisait la meilleure journée. À moins de 2/10e au kilomètre des pilotes en lice pour la victoire, il remontait à moins de quinze secondes de la sixième place. Sur un rythme proche, Andreas Mikkelsen progressait lui aussi pour atteindre le top 10 du classement général. Craig Breen retrouvait le sourire : malgré sa position d’ouvreur, il rebâtissait progressivement sa confiance, avec le Rallye de Finlande déjà en ligne de mire.

Dimanche, il ne restait que quatre spéciales pour figer les positions. La pluie étant de retour, les pilotes devaient de nouveau composer avec des conditions extrêmement glissantes. Malgré les pièges tendus par le parcours, Stéphane Lefebvre et Gabin Moreau achevaient leur très bon week-end en arrachant la cinquième place dans la Power Stage. Ils égalaient ainsi leur meilleur résultat en WRC, obtenu au Monte-Carlo 2016.

Ayant perdu la dixième place lors d’un tout-droit dans l’ES21, Andreas Mikkelsen et Anders Jæger attaquaient jusqu’au dernier point-stop. Après avoir signé le troisième temps de la Power Stage, ils terminaient neuvièmes, à moins de cinq secondes de la huitième place.

À nouveau ouvreurs, Craig Breen et Scott Martin terminaient quant à eux l’épreuve au onzième rang du classement général.

QUESTIONS À YVES MATTON, DIRECTEUR DE CITROËN RACING

Comment jugez-vous les résultats de Citroën Total Abu Dhabi WRT à l’arrivée du Rallye de Pologne ?

« Dès que nous avons pris connaissance du bulletin météo pour la première journée du rallye, nous avons su que nos pilotes ne seraient pas en mesure de se battre pour les premières places, pour deux raisons : le fait que la totalité de nos essais avec les nouvelles évolutions se soient déroulés sur le sec et nos ordres de départ particulièrement défavorables avec la pluie. De plus, la course de Craig a été compromise d’emblée, par un problème mécanique. Malgré ces vents contraires, personne n’a baissé les bras. Dès que les conditions sont devenues plus homogènes, nos pilotes sont revenus dans le match en exploitant le travail effectué au préalable. À partir du vendredi midi, Andreas, Stéphane et Craig totalisent quinze temps dans le top 5 d’un des rallyes les plus intenses de l’histoire du WRC. Les miracles n’existent pas en sport automobile : le travail que nous avons entrepris mettra du temps à payer, d’autant que les autres équipes ne nous ont pas attendu pour progresser. Les derniers dixièmes sont toujours les plus difficiles à aller chercher. »

Cette fois, c’est Stéphane Lefebvre qui vous apport le meilleur résultat de l’équipe…

« Lorsque j’ai annoncé à Stéphane qu’il ne serait pas au départ en Sardaigne, je lui ai demandé de travailler encore plus dur pour préparer la Pologne. Il avait fait une belle course sur ce terrain en 2016 et nous savions qu’il avait le potentiel pour obtenir un bon résultat. Ce week-end, il a su assembler tout ce qu’il a appris dans sa jeune vie de pilote professionnel. Il a eu l’intelligence d’attaquer lorsqu’il se sentait en confiance et d’assurer un peu plus lorsque les conditions étaient trop piégeuses. Et pour une fois cette saison, la réussite a été de son côté. Ce résultat va permettre à Stéphane d’augmenter sa confiance. »

Vous ne ferez toutefois pas appel à lui lors des deux prochains rallyes ?

« En Finlande, nous ferons rouler Kris Meeke, Craig Breen et Khalid Al Qassimi. Pour l’Allemagne, les trois C3 WRC seront confiées à Kris Meeke, Andreas Mikkelsen et Craig Breen. Nous visons un retour de Stéphane en Espagne. Comme chaque mécanicien ou ingénieur, les pilotes doivent pouvoir se mettre au service de l’équipe, car notre priorité est d’obtenir les meilleurs résultats pour Citroën. Stéphane le comprend bien. Il ne restera pas sans activité pendant cette période, puisqu’il participera à différentes séances d’essais. »

Avez-vous bien fait de ne pas faire rouler Kris Meeke en Pologne ?

« Ce n’est pas la première fois que cela arrive dans l’histoire du WRC : plusieurs équipes qui ont procédé à des ajustements dans leurs effectifs par le passé. Je crois sincèrement que Kris avait besoin d’un break. L’objectif est simple : que Kris revienne, meilleur que jamais, pour que nous gagnions ensemble. Aujourd’hui, personne ne peut dire avec certitude qu’il s’agissait d’une bonne ou d’une mauvaise option. Mais nous ne pouvions pas rester sans rien faire, il fallait agir pour mettre fin à cette série et j’assume cette décision. »

Kris ne peut pas être le seul responsable de cette mauvaise passe, le comportement de la voiture semble également en cause…

« Nous n’avons jamais dit cela. Il convient toutefois de rappeler qu’à l’issue de chaque séance d’essais, les pilotes se disaient très satisfaits du comportement de la voiture. Sur les rallyes, ils ne parvenaient pas à retrouver leurs sensations en conditions de course. Cela signifie donc que certaines directions prises lors du développement de la C3 WRC n’étaient pas adaptées au besoin. Une fois que nous avons eu le recul nécessaire, j’ai demandé à l’équipe technique de travailler sur des évolutions amenant plus de polyvalence. Il y a eu plusieurs évolutions de suspensions depuis le Rallye de Suède, les évolutions sur la transmission en Pologne et d’autres suivront encore ces prochains mois. Tout ceci prend du temps. En comptant sur un effectif de pilotes plus large, nous sommes confiants dans notre capacité à prendre plus vite les bonnes orientations. »

Vous avez également réorganisé votre équipe, avec un nouveau directeur technique…

« En effet, Laurent Fregosi – qui occupait ce poste depuis un an après avoir été le responsable châssis des C4, DS 3 WRC et C-Elysée WTCC – souhaitait retrouver un rôle axé sur la technique pure. Nous avons fait appel à Christophe Besse, un ingénieur qui connaît bien la maison puisqu’il faisait partie de l’aventure de la Xsara WRC au début des années 2000. Ce changement fait partie des nouvelles bases posées ce week-end. »

L’objectif de la saison 2017 était de gagner des courses. Est-ce toujours le cas ?

« La priorité, désormais, est de préparer 2018. Certaines évolutions nécessitent plusieurs mois de développement et elles ne pourront être introduites qu’au début de la saison prochaine. Cela ne veut pas dire que nous ne gagnerons pas d’autre épreuve en 2017. Au Tour de Corse, nous avions démontré le niveau de performance de la C3 WRC sur asphalte… Pour autant, j’ai demandé aux ingénieurs de se concentrer sur le développement de la voiture, plutôt que sur les réglages spécifiques à chaque rallye. »

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