Les petites écuries sont la colonne vertébrale de la F1 pour Kaltenborn

Alors que les constructeurs ne font que passer

Par Alexandre C.

11 janvier 2017 - 17:23
Les petites écuries sont la colonne (…)

Sauber est ce que l’on appelle une écurie privée : l’équipe ne bénéficie du soutien d’aucun grand constructeur et doit donc compter sur des moyens limités. Avec les années, le statut d’une écurie privée ne va pas en s’améliorant semble-t-il (en témoigne encore, le récent placement en redressement judiciaire de Manor).

Cependant, Monisha Kaltenborn, la directrice de Sauber (qui a frôlé la faillite avant d’être racheté par Longbow Finance), assure que « les défis sont assez similaires » à ceux des années précédentes.

« Vous luttez toujours contre les équipes qui ont des budgets bien plus importants et qui ont bien plus de personnel, donc qui peuvent mener des programmes de développement parallèles et qui ont bien plus de gens disponibles pour régler les problèmes. Mais nous y sommes habitués, nous avons toujours eu un niveau d’efficience très élevé. Nous devons cependant progresser pour développer notre équipe plus encore, pour la mettre aux standards actuels. Nous avons un peu un rôle exotique en Suisse. Nous ne sommes pas comme Ferrari, qui est l’écurie la plus ancienne en F1. Nous devons procéder à certains changements dans notre organisation pour progresser et pour nous mettre au niveau de ce qu’est la F1 aujourd’hui. C’est un genre de développement différent. Si vous regardez ce qu’était la situation auparavant, vous aviez des tests, des essais privés. Donc nous devons nous adapter à ces changements, y adapter nos structures. »

Ross Brawn, ou encore les nouveaux propriétaires de la F1, Liberty Media, souhaiteraient davantage soutenir les petites écuries. Monisha Kaltenborn ne sera bien sûr pas d’un avis différent…

« Je pense que les écuries privées sont la colonne vertébrale du sport. Si vous le regardez de près, les constructeurs vont et viennent, nous savons tous cela, et nous y sommes habitués. C’est une affaire de temps, quand ils arrivent, de les voir partir, soit quand ils ont accompli leurs objectifs, soit quand ils ne les ont pas accomplis, parce qu’être numéro 2, pour un constructeur - comme c’était le cas avec nous avec BMW - n’est pas une option, ce n’est pas assez bon, ils doivent être au sommet. Or, pour nous, la F1 est au cœur de notre business. Ce n’est pas une plateforme marketing très chère, où vous devez faire étalage de votre technologie. C’est ce que nous faisons, donc c’est pourquoi nous sommes toujours là, peu importe ce que traverse le sport. Quand les constructeurs s’en vont, ils se soucient peu de l’état dans lequel ils laissent le sport, mais nous sommes toujours là et nous devons toujours, d’une manière ou d’une autre, faire face à ces défis. »

La situation ne serait pas si grave si les revenus n’étaient pas distribués de manière aussi inégalitaire en F1. C’est ainsi que Monisha Kaltenborn enchaîne elle-même sur son cheval de bataille : la redistribution des revenus en F1.

« Je pense que ces points devraient être un peu plus soulignés. C’est un problème. Il y en a un autre, pour une équipe comme nous… ce sont les privilèges de certaines équipes, et nous considérons que cela fausse la compétition. »

L’Autrichienne, qui a porté plainte avec Force India auprès de la Commission Européenne pour mettre fin à ce système qu’elle considère injuste, n’oublie pas non plus de porter le combat sur le terrain politique.

« Tout d’abord, il y a ces privilèges financiers, qui ne sont pas vraiment justifiables. Ensuite, il y a la gouvernance, avec le Groupe Stratégie, où certaines équipes ont des avantages et des privilèges dans la prise de décision. Ces deux points aboutissent à fausser la compétition. »

Avec moins de ressources financières, Sauber doit donc faire appel à des pilotes payants. C’est ainsi que l’écurie ne peut parfois pas donner sa chance aux pilotes les plus talentueux mais aussi moins les moins fortunés… Toutefois, sur ce sujet, Monisha Kaltenborn tient à remettre les points sur les i…

« Nous avons donné, même récemment, une chance aux pilotes talentueux. Je ne pense pas que ce soit correct de dire que si quelqu’un vient avec un soutien financier, alors, automatiquement, ce pilote n’a pas de talent, ce n’est pas l’équation. L’équation, c’est qu’un pilote doit être talentueux, parce qu’il a convaincu un soutien financier pour cette raison. »

« Si vous n’êtes pas bon, personne ne va vous donner cette sorte de soutien. Nous ne parlons pas de petites sommes d’argent ici. Je pense que c’est une très mauvaise perception que les gens ont, de penser que du moment que vous avez un soutien financier… au fond, tout le monde ici a un soutien à un moment donné de sa carrière, ils ne sont pas arrivés tout seul ici, quelqu’un a payé leurs factures, et ils ont dû s’assurer que leur budget tenait la route. Beaucoup de pilotes se sont présentés à nous avec beaucoup de soutiens, et nous ne les avons pas pris, parce que nous avons senti qu’ils n’étaient pas aussi talentueux. »

Il est vrai que des pilotes comme Fernando Alonso, avec la banque Santander, ou Romain Grosjean, soutenu par Total, ont pu bénéficier à un moment donné de leur carrière de soutiens financiers précieux.

« Ce que nous devons faire est différent, si on compare cela au passé. Car nous regardons aussi l’aspect financier [au moment de choisir un pilote], même si le talent ne fait pas de mal » reconnaît tout de même la directrice d’écurie.

Maintenant confortée financièrement, Sauber peut quoi qu’il en soit regarder plus sereinement l’horizon. Comment Monisha Kaltenborn voit-elle évoluer son écurie d’ici deux ans ?

« Tout d’abord, il ne faut pas réduire Sauber aux deux mauvaises années que nous avons eues. A considérer notre histoire dans le sport automobile, soit 45 années, il ne faut pas nous réduire aux saisons 2014 et 2016. Nous sommes une écurie suisse, une écurie européenne, c’est ce que nous sommes. Nous sommes une entreprise solide dans l’ingénierie, nous offrons des services de haute qualité dans ce domaine. C’est important de montrer que nous avons retrouvé de la stabilité, que nous sommes en croissance, et que nous sommes un centre de technologie unique. »

Pour 2017, Monisha Kaltenborn vise donc le retour dans le milieu de tableau. « C’est notre objectif, et nous ne voyons pas pourquoi ce ne serait pas faisable. »

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